mardi 17 janvier 2012

AMISTAD

Dernières modifs: 9 septembre  2013
EST-CE QUE LES NOIRS SONT BLANCS?

Amistad, Steven Spielberg, 1997 (152’). L’action se passe de 1839 à 1841. Esclavage. Abolition. États-Unis (disponible au Bugnon ANG/114, audio et sous-titres uniquement en anglais).
Sur DpStream (momentanément retiré). DVD disponible à la médiathèque de Dorigny.

Sur cette page:
1) Critique externe du film
2) Traite et esclavage
3) Lieux
4) Architecture
5) Langue
6) Religion 
7) Les Africains
8) Quelques personnages
9) Dates de l’action
10) Récit
11) Philosophie
12) Notes
Sources 


1) Critique externe du film:
Le réalisateur, Steven Spielberg, est d'abord un grand cinéaste hollywoodien (Les Dents de la mer, E.T., Jurassic Park, etc.) qui, ensuite, s'est tourné vers des sujets plus historiques: holocauste, esclavage, guerre mondiale, terrorisme (La Liste de Schindler, Amistad, Sauver le soldat Ryan, L'Empire du soleil, Munich). Film américain, pays où l’esclavage a causé une des plus grandes guerres du XIXe siècle, la guerre de Sécession ou guerre civile américaine (appelée «the Civil War» aux EU).

Un film sur l’esclavage est susceptible de trouver un large public aux États-Unis où beaucoup d’Américains ont des ancêtres africains (il y a actuellement 42 millions de African Americans aux États-Unis).

Le film date de 1997 ; l’ esclavage est proposé comme crime contre l’humanité depuis 1998 et désigné comme tel lors de la Conférence mondiale contre le racisme à Durban en 2001.

-->
Datant de 1997, et étant américain, le film est évidemment « politiquement correct », c'est à dire qu'il "adoucit excessivement les formulations qui pourraient heurter un public catégoriel (wiki)". Le film ne peut absolument pas contenir des propos négatifs envers les Africains. Ainsi, toutes les scènes où les captifs sont montrés sauvages, violents sont destinées à mettre en évidence des qualités positives que l’on découvrira plus tard dans le film.

-->
Ce document, cette source d’informations (le film), n’est pas un ouvrage de référence, pas une monographie, pas un article scientifique mais un récit le plus divertissant possible pour grand public pas forcément intéressé à l’esclavage. C’est d’abord une histoire, une aventure, une énigme, un procès, un déroulement. Cela fait référence à des aspects historiques, politiques, économiques, légaux et culturels de l’esclavage en 1839-1841. Dans un film, les informations n’ont aucune prétention scientifique.


2) Traite et esclavage:
Le film évoque plusieurs étapes classiques des récits de capture d’esclaves : la capture au filet par des prédateurs africains, le transport sans ménagement vers la côte, le paiement en fusils, l’usine à esclave, le transport sur le bateau (TECORA), l’exercice de la violence pour obtenir la soumission (assassinat, flagellation, brimade), l’entassement dans les cales, les conditions de transport, les viols, les « deaths by other means » (les suicides), le transbordement, la remise en état des « marchandises », la vente aux enchères, l’attribution d’un nouveau nom, p. ex. Bernardo.
Il faut distinguer la traite de l’esclavage, et il faut distinguer les pays. Dans le film, on parle de l’Angleterre, de l’Espagne, des Portugais et des États-Unis. De l’Afrique aussi (traite intra-africaine).
La traite est interdite = il est interdit de mettre un humain libre en esclavage.
Dès 1807, la traite est interdite en Grande-Bretagne.  Les Anglais commencent à patrouiller l’Atlantique, surtout la région de l’Afrique occidentale où se trouve justement la Sierra Leone. Dans la région de la Sierra Leone, protectorat anglais, la traite est interdite depuis 1807. Si des Africains étaient capturés dans cette région, même par des non-Anglais, par des Portugais par exemple, cela serait tout à fait illégal. En 60 ans, les Anglais libéreront 150'000 victimes de la traite et de l’esclavage (wiki). A la fin du film, on voit un épisode de libération de fort d’esclaves (le fort Lomboko).
Dans le film, le traducteur mendé-anglais, dit avoir été libéré par des Britanniques.
(Nota : Les Anglais ont perdu leurs colonies d’Amérique dès 1783 ; par la suite, ils interdisent avec zèle l’esclavage qui est si important pour l’économie des États-Unis).
L’importation (la traite) d’esclaves aux États-Unis est interdite depuis 1808. Le commerce d’esclaves (capturer des humains libres pour en faire des esclaves et les vendre) est punissable de la peine capitale dès 1820. La traite fut interdite en Espagne en 1817 et au Portugal (le Tecora est un navire portugais) en 1836 (donc 3 ans avant l'affaire de la Amistad).
Nom de rue, Bilbao, Espagne, 2013

L’esclavage est interdit = tout humain esclave doit être immédiatement rendu libre. (En GB 1833, en F 1848, aux USA 1865).
En 1811, l’Espagne abolit l’esclavage en Espagne et dans toutes ses colonies sauf Cuba (abol. 1886), Porto Rico (abol. en 1873) et Saint Domingue. Dans le film, les Noirs capturés en Sierra Leone sont transportés vers La Havane, Cuba (colonie espagnole), qui, en 1839, est un centre pour le commerce des esclaves. De là, ils sont embarqués vers une autre île des Antilles, mais ils « atterrissent » en Amérique.
Le Portugal abolit la traite atlantique en 1836.  La capture d’esclaves par des Portugais (Tecora) en 1839 était donc contraire à tous les traités de l’époque.
Aux États-Unis, l’esclavage est pratiqué dans les États du Sud jusqu’à la proclamation de l’abolition de l’esclavage par Lincoln en 1862-1863, en pleine guerre de Sécession. En 1865, à la fin de la guerre de Sécession, un amendement à la Constitution abolira définitivement l'esclavage aux États-Unis. A l'époque de la Amistad, dans certains États du Nord, l'esclavage est déjà interdit. Par exemple dans l'État de New York. Mais pas dans le Connecticut, juste à côté, endroit où sont détenus et jugés les Africains de la Amistad. Dans le Connecticut, en 1839, on peut acheter et vendre un esclave, si c'est un homme né esclave dans une plantation.
Les juges de la Cour suprême, que l’on voit lors du dernier procès, sont des sudistes, ils possèdent tous des esclaves.

-->
Dans le film, on fait confirmer à Cinqué que les peuples africains possèdent aussi des esclaves, depuis des siècles. On voit que les captures d’esclaves sont faites par des Africains. On voit des Africains recevoir leur salaire en fusils contre une cargaison de captifs.

Lors du deuxième procès, l’amiral anglais confirme que le commerce des esclaves est très lucratif (rapporte gros). Comme nous l’avons vu dans le cours, vers cette époque (1730 à env. 1850) les prix avaient atteint leur sommet. De plus, vers 1839, la traite était presque partout clandestine. Les prix sont donc très élevés, c’est un commerce très lucratif. Même pour les marchands africains, ce commerce était très profitable: "Le prix d’un captif sur la côte équivalait à 6 années de subsistance pour le vendeur africain".

Cf. Quatre cours sur l’esclavage, « L’apogée de la traite européenne ».
 
3) Lieux:
Dans le film, les Noirs capturés en Sierra Leone sont transportés vers La Havane, Cuba (colonie espagnole), qui, en 1839, est un centre pour le commerce des esclaves. De là, ils sont embarqués vers une autre île des Antilles, mais ils « atterrissent » en Amérique.
Sierra Leone, à l'origine, un très grand centre pour l’esclavage. Après l'abolition de l'esclavage par les Anglais en 1807 et 1833, la Sierra Leone sert au relogement des « Black poors » de Londres et des Noirs d’Amérique qui ont choisi le côté anglais lors de la guerre d'Indépendance. Située à côté du Libéria.
Côte d’Ivoire (dans le film, il est dit que le navire négrier TECORA opère en Sierra Leone et en Côte d'Ivoire), peu importante pour l’esclavage et plutôt sous contrôle français.
Carte: "Antique Maps of North West Africa", sur laquelle on voit "MANDINGUE", "Sierre Leone", "Côte d'Ivoire" (sic).



Lomboko :
« Apparemment, Lomboko était un lieu fortifié, créé par un notoire marchand d’esclaves espagnol, Pedro Blanco. Lomboko comprenait plusieurs grands dépôts ou baraques à esclaves apportés là depuis les terres intérieures. Lomboko était situé sur une île près de Sulima, à l’embouchure du fleuve Gallinas qui court le long des frontières Sierra Leone et Libéria. A l’époque, c’était un endroit contrôlé par les marchants d’esclaves espagnols. Actuellement, Lomboko se trouve sur le territoire de la Sierre Leone. Vers 1839, environ 2000 esclaves étaient ammenés à Lomboko par le fleuve, malgré le fait que la traite était interdite. En 1849, une expédition de la marine royale britannique détruisit l’usine à esclaves de Lomboko, à l’embouchure du fleuve Gallinas. Tous les esclaves de la forteresse furent libérés par la marine royale. Lomboko fut détruit, (la scène est reconstituée à la fin du film), (wiki).

  (wiki).


Cuba et la côte est :
http://www.detyens.com/maps-directions-naval-repair-united-states-detyens-shipyard-charleston-sc-tanker.htm
Grandes et Petites Antilles : http://www.paradise-islands.org/caribbean-map.htm.

Long Island, Connecticut, Massachusetts
Carte : http://www.new-england-map.com/.
Carte des 13 colonies : http://www.medarus.org/NM/NMTextes/nm_01_02_13col.htm.


4) Architecture:
Dans le film, on voit le Capitole actuel. Or -- selon  wiki « United States Capitol dome » , consulté 2 mars 2011 -- en 1839, le dôme actuel n’était par construit. Le « Palais fédéral » américain, jusqu’en 1850, était couvert d’un dôme en cuivre vert.
Dans le film, on parle des 9 juges de la Cour suprême. C’est le nombre actuel. Mais à l’époque, il n’y avait que 7 juges. Là aussi, le réalisateur prend une petit liberté pour simplifier la compréhension. Ces « erreurs » sont tout à fait admissibles dans une fiction filmée.



5) Langue : Mende
« Le mendé (Mɛnde yia) est une des langues principales parlées en Sierra Leone, et même un peu au Liberia voisin. C’est la langue africaine utilisée dans les films Amistad et Blood Diamond » (en.wiki).

Est-ce que les deux navigateurs et planteurs de la Amistad, Don Pedro Montez et Jose Ruiz, propriétaires des esclaves comprennent le mendé ?

Oui, certainement, ce sont des propriétaires d'esclaves, ils comprennent le mendé mais ils ne le parlent pas. Juste après la révolte, ils comprennent bien ce que les deux chefs africains se disent en mendé (voir minute 5'47'' version DVD sous-titrée). Puis Cinqué dit à Don Pedro Montez "conduisez-nous vers l'est" et Don Pedro Montez répond en espagnol: "oui, je comprends".

6) Religion
On voit beaucoup de signes chrétiens dans ce film : A l’arrivée à New Haven,  on voit tout d’abord l’église ; l’imprimerie du journal New Haven Register semble installée dans le clocher d’une église ; les 2 abolitionnistes (Lewis Tappan et l’ancien esclave Theodore Joadson) sont chrétiens ; les personnes qui viennent chanter et prier pour les prisonniers noirs sont chrétiens ; un chrétien veut faire poser sa main à un des accusés (Bernardo) sur une bible (qu’il se fait arracher des mains), etc. Tous ces chrétiens sont protestants ou réformés. On le sait parce que le fait d’être catholique est une chose très mal vue, que l’on tente de cacher si on veut occuper une place importante dans la société du Connecticut (le deuxième juge de l’affaire est petit-fils de catholique, et il fait tout pour le dissimuler).

Par deux fois, on voit passer un groupe de sœurs religieuses catholiques.


On voit le deuxième juge faire une visite dans une église catholique avant de donner son verdict lors du deuxième procès. D’après ce qui est dit de lui plus tôt dans l’histoire, le juge n’est pas catholique,  son grand-père l’était. Or, maintenant, il vient se recueillir dans une église. Est-il sous l’influence positive des Africains et vient-il renouer avec ses racines catholiques ? De cette re-naissance, il tirera la force et le courage de défendre la vérité.

Dans l’histoire du film, il est beaucoup question de l’Espagne et du Portugal, d’Espagnols et de Portugais. Quand les Africains montent sur le TECORA, ils sont bénis par un prêtre missionnaire portugais. Ceux-ci sont bien sûr catholiques.


Sur le bateau La Amistad, on voit qu’une partie des 44 Africains sont musulmans. Ils commencent leur prière quand soudain ils s’approchent d’un autre navire dans la nuit.


Les Africains pratiquent la religion des ancêtres. Cinqué dit « je ferai venir en moi tous mes ancêtres, et ils m’aideront, nous ne sommes pas seuls ». 

Les Africains veulent enterrer leurs morts selon le rite poro (une fois sur le bateau et une fois dans la cour du fort).  Quand Bernardo explique à Cinqué les images de sa bible, il remarque que la mise au tombeau du Christ, son corps enveloppé dans un linceul, ressemble à leur rite poro.
 

Bernardo est manifestement en train de devenir chrétien et d’autres Africains vont probablement le suivre dans cette voie.

Le film propose un parallèle entre la passion du Christ et le sort des esclaves :
Jésus souffre, il est torturé et flagellé, mais à la fin, il sauve le monde et il triomphe. Comme les esclaves. Ils sont mal traités, torturés, mis en captivité, flagellés (scène de la flagellation sur le Tecora), mais ils contribuent à « sauver » l’Amérique de l’esclavage (les États-Unis iront jusqu’à la guerre civile au nom de la liberté universelle), et eux-mêmes, les Africains, à la fin, triomphent.




7) Les Africains
Les Africains dans le film parlent une lingua franca en Sierra Leone et en Afrique occidentale : le mendé ; ce sont donc des Mendés, une ethnie majoritaire en Sierra Leone. On voit, lors d’un décès des leurs, qu’ils suivent un rite particulier, le rite poro. Mais comme habituel dans les groupes de captifs, ils sont d’ethnies mélangées. On voit cela quand ils défendent leurs territoires dans la cour de la prison. On apprend qu’il y a aussi, en plus des Mendé, des Temnés et des Sherbro. 
Carte sur laquelle on voit les ethnies "Mende" et "Temne".
Carte de la Sierra Leone indiquant les ethnies Sherbo, Mende et Temne.

-->
Les scarifications ou modifications de la dentition (p. ex. espacer les dents supérieures ou tailler en pointe les dents) sont pratiquées dans certaines ethnies d’Afrique, pour des raisons décoratives, de protection spirituelle, ou pour indiquer l’appartenance à une tribu. Dans le film, on parle de scarifications sur certains des Africains, on fait voir, en le faisant sourire, les dents artificiellement espacées d’un accusé, et, quand cet Africain meurt dans la cour du fort, on voit sur son dos des marques de tatouage ou de scarification. Sur le Tecora, la femme qui se jette discrètement à l’eau avec son bébé, porte elle aussi des scarifications. Si les Africains portent des scarifications, cela veut dire qu’ils ne sont pas nés dans les colonies --où ces pratiques sont interdites-- mais en Afrique.

Dans le film, le président Van Buren dit qu’il y a 3 ou 4 millions de Noirs aux États-Unis (en 1839). En fait, en 1840, il y avait 2,8 mio de  Noirs, soit 16.8%  de la population totale des 13 colonies, dont 2,4 mio étaient esclaves, soit  87% (Chiffres wiki).


Selon Michel CONDE qui est un spécialiste de l’utilisation des films dans l’enseignement (mais pas un spécialiste de l’esclavage ou de l’histoire des États-Unis, il se pourrait que, en 1839, dans le Connecticut, État encore esclavagiste, jamais un Noir comme Theodore Joadson n'aurait pu s'asseoir dans un restaurant avec deux Blancs, l'avocat Roger Baldwin et l'abolitionniste Lewis Tappan (source:  CONDE Michel, AMISTAD, un film de Steven Spielberg, Dossier Écran Large sur Tableau Noir, les Grignoux : 1999). Dans ce cas, l'autre scène, réunissant dans un bistrot du port le traducteur noir, Baldwin et Joadson, est également invraisemblable.



8) Quelques personnages :
Joseph Cinqué (nom africain Singbe Pieh), un des deux chefs Noirs. C'est un des personnages principaux du film, c'est le chef des Africains, celui qui parle, celui qui représente l’honneur des Africains. L'autre grande figure est John Quincy Adams, l'ex-président des États-Unis, qui gagnera le procès pour les Africains, au cours d’une plaidoirie qui, paraît-il, dura 7 heures, dans laquelle il compare la révolte des esclaves de La Amistad à celle des 13 colonies américaines contre l’Angleterre. Et il invite les États-Unis de 1841 à ne par reculer devant la guerre civile américaine pour vaincre l’esclavage, si cela devient nécessaire. Et c’est en effet ce qui arrivera en 1861, la guerre de Sécession au sujet de l’esclavage.
Devant la Cour suprême, John Quincy Adams compare Cinqué à Patrick Henry.
Patrick Henry conduisit l’opposition  contre la loi de 1765 sur le droit du timbre. Il est très connu pour son discours « Donnez moi la liberté ou la mort ». Il est un des pères fondateurs des États-Unis, un des grands avocats, comme Samuel Adams et Thomas Paine,  de la révolution américaine et de l’indépendance.
Il y a deux chefs africains parmi les 44 captifs, Cinqué et un autre, tout aussi baraqué que lui, Bernardo. Durant la première moitié du récit, quand ils sont ensemble, ils se disputent tout le temps. Cinqué est le plus important, celui qui représente les idées de liberté. Mais c’est Bernardo qui a convaincu Cinqué de ne pas tuer aussi les deux négriers Don Pedro Montez et Jose Ruiz, afin que ceux-ci ramènent le navire en Afrique. Bernardo sera le premier à se convertir au christianisme. 

Il y a peut-être un troisième chef (puisqu’il y a trois ethnies), ce serait celui qui découvre le premier la terre ferme, celui qui porte des scarifications et des dents modifiées, celui qui meurt au fort et que les Noirs veulent enterrer selon le rite poro.

Président Martin Van Buren, 8ème président (1837–1841), démocrate.
L'ex-président John Quincy Adams, 6ème président (1825–1829), démocrate.
Les 2 navigateurs et planteurs espagnols sur la Amistad : Don Pedro Montez et Jose Ruiz.
Lewis Tappan (1788 - 1873), abolitionniste. Il y a deux abolitionnistes principaux dans le film, l’historien noir Theodore Joadson (personnage fictif) et Lewis Tappan, personnage historique, représentant un parti abolitionniste newyorkais, qui a payé tous les frais de défense lors des procès de l’Amistad.Il possède "différentes affaires et des banques". C’est lui qui suggère, après le deuxième procès, que les captifs de la Amistad seraient plus utiles morts que vifs à la cause abolitionniste, car, dit-il, « il n’y a pas de pouvoir plus fort que le martyre pour changer les choses ». Lui « finance » le procès car il pense que l’affaire va « délivrer un message, comme Jésus en a délivré un en montant sur la croix ».
Roger Sherman Baldwin, avocat à New Haven.
Theodore Joadson (historien, abolitionniste, personnage fictif).
John Caldwell Calhoun (1782-1850), sénateur d'un État du sud. Défend l'esclavage lors du banquet présidentiel et rédige des essais sur l'esclavage (mentionné et lu lors du procès devant la Cour Suprême).
-->
Isabelle II, reine d'Espagne: En 1839, lors des faits, Isabelle II est déjà reine (on voit ses poupées, on la voit manger, on l'entend lire une lettre). Elle est "pré-pubère" dit le président Van Buren. En fait, elle est devenue reine à 3 ans, en 1833. En 1839, elle n'a donc que 6 ans (on a dû la vieillir un peu pour le film). Tout à la fin du film, un carton nous apprend qu'elle régna jusqu'en 1868! soit en tout, 35 ans!


Les prétendant propriétaires
John Forsyth, secrétaire d’État (Monsieur le Ministre) durant la présidence de Van Buren. Selon un traité entre les États-Unis et l’Espagne, les esclaves doivent être rendus à leurs propriétaires respectifs. Comme il pense que ce sont des esclaves venus de Cuba, il demande à la cour de les rendre à l’Espagne. L’ambassadeur d’Espagne le demande aussi.


Le Ministère public. Il défend la loi au nom de son État. Donc, il accuse des Africains capturés d’être des assassins.


Les abolitionnistes et l’avocat Baldwin qui défendent les Noirs car, comme dit Lewis Tappan, les Africains «vont délivrer un message – comme Jésus, par sa mort, délivra un message-- ».


Les 2 navigateurs et planteurs espagnols sur la Amistad : Don Pedro Montez et Jose Ruiz.
Les officiers américains qui ont capturé la Amistad.
Le terme « The United States of America » est définitif à partir de 1778.


9) Dates de l’action :
1839 à 1841.
10 mai 1939, date à laquelle 50 captifs (surtout des femmes) ont été jeté à la mer depuis le TECORA.
Ils ont quitté Cuba le 18 juin 1839. Il ont accosté au nord des Etats-Unis plus de six semaines après, soit vers fin août ou plus tard.

Arrivée vers Long Island: En réalité, ils accostent vers Long Island le 24 août 1839. Mais dans le film, on laisse penser que c’est plus tard dans l’année, car il y a de la glace sur l’étang où ils prennent de l’eau douce.
Pour les États-Unis de 1839-1841, l’esclavage est une question extrêmement grave, qui menace de provoquer une guerre civile entre ceux qui sont pour et ceux qui sont contre. Cette guerre civile aura lieu en 1861-1865, la guerre de Sécession.

Rappel: l’action se passe de 1839 à 1841.
La traite est interdite partout, mais pas l’esclavage, encore pratiqué dans certains Etats aux Etats-Unis, dans les colonies espagnoles (Cuba, Porto Rico, Saint Domingue) et françaises (Guadeloupe, Martinique) des Antilles.

Van Buren est président de 1837–1841. L’action commence en 1839. On parle de la campagne électorale du président. Celle-ci ne peut avoir eu lieu qu’en 1836 ou en 1840. Mais dans le film, on donne l’impression que la campagne se déroule durant 1839. 

Le traité de Madrid, connu aussi sous les noms de traité de Pinckney ou traité de San Lorenzo, fut signé à San Lorenzo de El Escorial le 27 octobre 1795 entre l'Espagne et les Etats-Unis (fr.wiki). 

Bataille d’Atlanta, 1864, 12'000 morts.
Une bataille importante vers la fin de la guerre de Sécession. Les troupes nordistes battent les sudistes. Cette bataille est importante car elle rend possible la réélection du président Lincoln (en.wiki). 


10) Récit
Quand les 44 Africains de Sierra Leone sont capturés pour la deuxième fois au nord des États-Unis, au large de New Haven dans l’État du Connecticut, un État où l’esclavage est toujours en pratique, les Africains déguenillés sont naturellement soupçonnés d’avoir tué tout l’équipage blanc de La Amistad. Il faut tirer cela au clair, il va y avoir une affaire dans la presse et plusieurs procès pour établir si ce sont des assassins (« Massacre en mer ») ou des victimes d’un crime affreux, la traite, strictement interdite dans tous les États des États-Unis depuis 1808 - 1820, (« combat pour la liberté en mer »).

C’est une affaire d’importance nationale. Si on libère les captifs, les États du Sud ne seront pas contents et ne voteront pas pour Van Buren. Et en plus l’Espagne, la troisième grande puissance mondiale de l’époque, ne sera pas contente non plus.
Si on les condamne, les abolitionnistes des États du Nord ne seront pas contents et ne voteront pas pour Van Buren.


Il semble y avoir un parallèle entre l’histoire de Jésus et les étapes de l’aventure en mer et en Amérique des captifs de la Amistad.
Histoire de JésusHistoire des Africains de la Amistad
Il guérit de ses mains

Il protège



On lui confie les enfants

Il marche sur l’eau


***
TrahiAccusé (à tort)
Traîné en justice
Soumis à un procès
Humilié

Ligoté
Flagellé
Crucifié





Mis au tombeau enveloppé dans un linge




Jésus réapparaît à ses disciples




Jésus monte au ciel.
?

La dent qui protège Cinqué, cette dent donnée à Joadson « pour vous protéger ».

Scènes à l’enfant sur le Tecora

Le voyage par mer des Africains (qui sont probablement pour la première fois sur l’eau)
***
Trahis
Accusés (à tort)
Traînés en justice
Soumis à un procès
Humiliés
Eux aussi sont ligotés
Sont flagellés sur le Tecora
Plusieurs sont tués par balle, par noyade, par flagellation, et par « other means » c'est-à-dire par suicide.


Comme les Mendé font avec le rite poro pour ensevelir leurs morts

Ils ré-émergent après chaque procès. La vérité sur les Africains, sur l’esclavage, sur l’humanité apparaît enfin.

 

Ils triomphent à la plus haute cour. Certains deviennent chrétiens.

Le thème « sauvage ». Tous les clichés à propos des Africains sont exposés, pour mieux montrer, en cours de récit, combien, en fait, ils recouvrent des points positifs de la civilisation africaine.

Les Africains sont montrés comme « sauvages », commettant des « éclats », ne respectant pas la retenue civilisée.
Cette « sauvagerie » est une pureté, une sincérité, une cohérence, une dignité, une humanité et finalement, un exemple.
Les stéréotypes (négatifs) sur les AfricainsLa dignité des Africains, leur égalité avec ce qu’il y a de meilleur dans tous les humains.
**********
L’idée péjorative que les Africains vivent en tribu avec un petit chef
Tout au long du film, se déploie la noblesse du chef Cinqué. Adams, à la fin dit « comme j’aimerais être un chef ».
Bernardo est montré comme un chef agressif, querelleur
Au contact de la bible, il deviendra doux et croyant.
La fable du lion tué avec une pierre pour justifier la position de chef de Cinqué peut sembler naïve.
Adams reprend la métaphore du lion pour parler de l’esclavage en Amérique.
La religion des ancêtres, la croyance que les ancêtres sont toujours autour de nous.
Cette croyance est reprise par Adams : nous sommes ce que nous avons été, nous avons besoin de nos ancêtres. C’est cela qui va faire advenir la vérité, la justice et le courage d’éradiquer l’esclavage.
Rites funéraires poro bruyants et considérés incompréhensibles « mais que veulent-ils, ils veulent vivre avec (le cadavre) ? »
Plus loin dans le récit, on découvre que ce rite –envelopper le mort dans un drap et le placer dans une grotte—est la manière biblique  de mise au tombeau.
« Il faut nous libre », intervention appelée « un éclat » par le ministère public lors du deuxième procès.
Pour faire éclater la vérité, il faudra trois procès et un avocat extraordinaire (un président des États-Unis), au cours d’une plaidoirie de 7 heures !
Danses bruyantes et prolongées devant un feu pour marquer leur acquittement au deuxième procès.
Toutes ces manifestations bruyantes paraissent en effet bruyantes au début. Mais à mesure que la vérité devient admise, on voit que ces explosions de joie sont tout à fait « raisonnables ».
Ils crient beaucoup. Ils parlent fort. Cinqué se met nu et hurle des propos pour marquer son désaccord concernant « presque toujours », « presque vrai ».
Le verdict de la Cour suprême souligne : « droit de se rebeller ». Droit de dure haut et fort ce qui ne va pas.
Sont probablement de religion animiste.
Adams lui aussi vénère les plantes comme si elles avaient une âme.
Ont la religion des ancêtres, « faire venir les ancêtres en soi ». Les ancêtres sont avec nous.
C’est l’invocation des ancêtres de la nation américaine qui fait triompher les propos de Adams devant la Cour suprême.
 

11) Philosophie

L'esclavage est naturel.
Le texte du sénateur John Caldwell Calhoun proclame que « dans les sociétés, il y a toujours eu des hommes qui ont tiré profit du travail d’autres hommes. Même dans le Jardin d’Éden, où il n’y avait que deux personnes, l’une était supérieure à l’autre. L’esclavage fait partie de la vie, tout comme l’antagonisme et la guerre ».

La liberté est naturelle.
L’état naturel de l’homme, c’est la liberté. Preuve en est le mal qu’un homme se donnera pour recouvrer sa liberté : il brisera ses chaînes, il décimera ses ennemis, il essaiera encore et encore : toutes choses que les captifs de la Amistad ont faites, ce pour quoi ils méritent des louanges, et ce en quoi, nous, Américains, nous devons les imiter (se débarrasser de l’esclavage dans notre pays, même si cela signifie faire la guerre contre les États du sud). 
Le verdict de la Cour suprême : Les accusés (les Africains de la Amistad) sont des individus libres, ils ont le droit de s’engager dans une insurrection contre toute personne qui leur enlèverait leur liberté.





12) Notes

Est-ce que les Noirs sont blancs ?
Le film Amistad nous place dès la première scène devant cette interrogation : les esclaves, Noirs, sont-ils de sauvages assassins  (« Massacre en mer », selon un journal de New Haven) ou des combattants de la liberté (« Combat pour la liberté en mer » selon un autre journal) ?
Cette opposition noir-blanc file tout au long du récit.
Les Africains sont montrés et présentés comme des sauvages (extrême violence) avant que l’on ne découvre leur histoire. Quand on saura qui ils sont, on trouvera que leur férocité est une marque d’extrême humanité : ils se battent pour retrouver la liberté, pour sauver leurs femmes et leurs enfants, ils font ce que les meilleurs êtres humains feraient dans de telles situations, résister à l’injustice.

Dans sa très longue plaidoirie devant les juges de la Cour suprême, à la fin du film, Adams compare la lutte pour la liberté des accusés au juste combat qui a donné aux États-Unis leur indépendance.
Devant la Cour suprême, John Quincy Adams compare le chef africain Cinqué au patriote américain Patrick Henry. Patrick Henry conduisit l’opposition  contre la loi de 1765 sur le droit du timbre. Il est très connu pour son discours « Donnez moi la liberté ou la mort ». Il est un des pères fondateurs des États-Unis, un des grands avocats, comme Samuel Adams et Thomas Paine,  de la révolution américaine et de l’indépendance.
Et nous, Américains blancs de 1841, est-ce que nous oserons encore nous battre pour imposer la liberté à notre propre nation, est-ce que nous oserons nous battre (contre l’esclavage) aussi courageusement que ces Africains ? "Donnez-nous le courage de faire ce qui est juste, la dernière bataille de la Révolution américaine" dit Adams.

Le film veut démontrer, dire mais aussi nous faire vivre, éprouver un passage du rejet vers l’élection.
Les Noirs sont montrés comme sauvages, brutaux, insoumis, violents, querelleurs – symbolique de la couleur noire, côté du racisme anti-noir--, mais, à mesure que l’on découvre leur histoire, qui ils sont vraiment, les Noirs apparaissent comme animés et défendant les idéaux de justice et de liberté les plus élevés – symbolique de la couleur blanche, du salut dont doit s’inspirer l’Amérique--. Tout à la fin du film, Cinqué est d’ailleurs vêtu tout de blanc.

Le film est monté de telle manière qu’il chatouille nos éventuels préjugés anti-Africains, afin de, par contraste, montrer, à la fin, combien, au contraire, ces 44 Africains incarnent les idéaux les plus naturels et les plus humains de liberté. La première scène joue à fond sur ce contraste : les Africains se libèrent à coups de machettes ! (pour le public de 1997, une image pas du tout politiquement correcte).

Un Noir peut être un Blanc. Lorsque les 44 captifs se rendent pour la première fois au tribunal, ils voient sur la place un cocher noir sur une diligence. Un des captifs l’interpelle, « chef ! », un autre lui crie « frère ! », mais le cocher ne répond pas.  Devant l’indifférence de ce Noir, Cinqué dit alors, « ce n’est pas un chef, c’est un Blanc ».

Les 3 lions
On explique que Cinqué est le chef car, autrefois, il a tué d’un coup de pierre un méchant lion.
L’avocat Baldwin utilise le terme « l’autre lion » pour désigner le déclenchement de la révolte sur le navire.
Et à la fin du film, Adams parle du « lion » (l’esclavage) qui menace de déchirer notre pays (les États-Unis) en deux. 


Le film distille aussi des propos rhétoriques, des déclarations concernant la manière de raconter l’Histoire : par érudition ou par bon cinéma ?
« Une érudition sans état de grâce ne sert à rien » dit l’ex-président Adams à l’historien noir. Pour nous spectateur, cela peut vouloir dire qu’une monographie très érudite sur l’esclavage n’égale pas un film bien romancé, capable de transmettre des émotions justes à propos de l’esclavage.
« Celui qui raconte la meilleure histoire gagne ». Pour parler de l’esclavage, il faut trouver une bonne histoire. Et nous sommes justement en train de visionner une bonne histoire.
« Qui ils sont, quelle est leur histoire ? Quelle est votre histoire ? ». Le principe de raconter des histoires (de faire des films) est élevé ici au rang de vérité. Une véritable histoire qui marche (un bon film) c’est l’équivalent de la vérité, la vérité philosophique ou même scientifique.
Et plus souligné encore, au moment du dénouement, la Bible, qui elle aussi propose « une histoire », sert à diriger le juge dans la bonne direction.


Par opposition, le méchant du film, celui qui veut la condamnation des Africains dit, à la suite du témoignage de Cinqué sur la capture et le transport des esclaves : «  Comme toutes les bonnes oeuvres de fiction, c’était très divertissant, rien de plus ».
Comprendre par les images : Dans la prison, Bernardo comprend l’évangile juste en « regardant les images » comme nous, spectateurs, commençons à comprendre l’esclavage par les images du film.

Amistad raconte une histoire, qui est l’Histoire, pas pour son exactitude scientifique mais pour sa sincérité. 


Les « images » du film
A propos de l’esclavage, nous avons tous en tête une gravure comme ceci :


Ici, dans le film, on voit la version en couleur, en mouvement, dramatisée et sonorisée de ce traitement inhumain.

J’ai vu aussi deux « images» se rapportant à l’Afrique contemporaine : la scène des machettes, et la scène de la faim en Afrique (les mains tendues pour recevoir la nourriture sur le bateau).


Sources:
Exploring Amistad, Museum of America and the Sea. 
Teaching with documents : The Amistad case. (Archives nationales américaines).
CONDE Michel, AMISTAD, un film de Steven Spielberg, Dossier Écran Large sur Tableau Noir, Les Grignoux : 1999. 

Chase-Riboud, Barbara, Le nègre de l'Amistad : roman / Barbara Chase-Riboud ; trad. de l'anglais par Elisabeth Lesne et Serge Quadruppani, Paris : A. Michel, 1989, 329 p., traduit de: Echo of lions


‘Amistad’: facts & fiction
http://www.hartford-hwp.com/archives/45a/326.html


***

NOTES SUR DES FILMS OU DES DOCUMENTAIRES.

***
HISTOIRE - Sz
gmslausanne

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire